Tout s’est restreint autour de la Poésie.
Finalement, après toutes ces années au cours desquelles la Poésie a été moquée et les poètes mis à part, reviennent leurs mots. Il y aura beaucoup de morts que nous coucherons sur les tendres mots de la Poésie car personne ne pourra assister à leurs funérailles.
Je suis défaite par une panique qui s’éffondre au fur et à mesure de son érection . Je flippe pour mon boulot. Tous mes clients ont fermé, sauf Un et c’est le meilleur microcosme puisque comme une matrice imperturbable, le e-commerce ne connait aucune crise et son service se propage et se contient et fonctionne dans la grande et nouvelle réorganisation du Travail, à domicile, haché, interrompu, mêlé maintenant au privé de nos vies mais vivant, indispensable et mené par une génération mutante qui est déjà exercée au confinement depuis un bail. Je suis en formation de ce Temps. L’Argent rentre quand même par mauvais Temps. A condition de rester comme eux aux commandes, à éluder la vie réelle pour lui préférer le prochain tournant sur la Toile qui nous sauve des pénuries et du manque de rêves. Je suis là à tenir les comptes et je suis bien aise de tenir ma fonction dans le chaos des conférences-call avec ma propre musique en arrière fond. Je me lève tous les matins et je me fais belle, je mets du rouge à lèvres très fort et je porte Opium pour affronter ce truc qui me dérange de ne pas aller au taf, de ne plus prendre le métro qui me manque à mort et aussi de sentir l’Humanité.
L’amour au temps du Corona j’en suis. Je suis en résistance. J’atteste de tout pour lui. Je le retrouve où je peux. Je prends les risques de ceux qui sans être vraiment vieux ne veulent plus spécialement de la suite, ceux qui sont déjà sur la touche et qui ont bien rangé leurs affaires pour ne pas plomber leurs fils. J’en suis. J’en suis de ne pas avoir peur. J’aime la vie donc je serai bien prise par la mort. Tout est bien.
C’est un temps où parler des choses essentielles. On ne challenge plus Baby, on a envie de Faire l’Amour, c’est fini Tinder, on regrette la peau, l’haleine, toutes les caresses jamais déployées au lendemain d’une soirée 3C. C’est fini l’Epoque. On, vous allez devenir grands. Vous allez vous démerder et faire comme vous voudrez sans Nous, car on va y passer. Ce sera place nette et tout ce que vous vouliez faire, vous vous y coltinerez. Tout est bien. Ce qui m’étreint c’est votre manque de religion. Ce qui me rassure est votre vie spirituelle nouvelle assise Octopus sur toutes sortes de croyances qui vous conviennent.
Je parle au fur et à mesure de ce qui m’étreint. J’ai vécue confinée dans ma toxicomanie pendant des années. J’avais une vie de schizophrène et j’étais dédoublée. Ma vie a toujours été un royaume où j’ai dansé devant le miroir en écoutant de la musique. J’ai tous les livres, j’ai suffisamment de papier pour dessiner, j’ai tous les fards dont me parer, j’ai le souvenir de tous ceux que j’ai aimés. Rien ne me manquera jamais sinon les terrasses de Paris et mes amis attablés à leurs tables, bravaches, saouls, stupides et amoureux et prompts à la connerie et à la blague, à l’outrance.
Ce soir, on revoit le Grand Jeu. C’est le Contre-Ciel.