J’ai tiré du néant la plus belle photo de toi
Celle où tu as les yeux verts et où tu te tiens droit
Celle qui compte pour moi, tu as 17 ans, j’étais de cet âge et tu me prends pour me parler comme je voulais depuis longtemps
J’ai tiré du néant la plus belle photo de toi
Celle où tu as les yeux verts et où tu te tiens droit
Celle qui compte pour moi, tu as 17 ans, j’étais de cet âge et tu me prends pour me parler comme je voulais depuis longtemps
Ce n’est pas grave que nous dormions peu. Nous aurons volé toutes les heures chiantes de demain dont nous n’avons que faire et qui s’étirent. Ce soir c’était si bien. J’ai tout annulé pour toi. Et puis tu es le seul à m’entendre sur cette fréquence.
Puisque ici est le seul lieu où je suis moi,
Je vais te dire combien tout est changé et neuf que tu m’aies aimée comme je n’ai jamais été aimée. Absolument.
Malgré nos vingt ans, notre grand écart et tout ce dont nous n’avons cure.
Le bien fou de cette caresse
Tu serais le fils de la mort et je serais immortelle.
Te retrouver aux mots croisés à l’abreuvoir. Rien ne colle à la vraie vie et nous sommes taiseux. Nous ne savons comment faire.
Je ne sais pas trop comment c’est arrivé mais par l’aqueduc, c’est certain.
Je me tenais au bar comme tu t’y tenais. De boire ensemble, de nous raccompagner plus loin que la Mosquée et du Jardin, plus loin vers le boulevard de l’Hôpital, plus loin au pied des secrets, voisins et meurtris.
Je ne sais comment l’obsession de toi m’a brusquement quittée. Enfin Jésus. Tu te levais avec moi dans la poisse de tous les matins de ces années infinies, je t’injuriais le jour durant.
Maintenant je ne sens plus rien de cette terreur. Je me suis mise à serrer un autre corps qui me caresse enfin. Alors c’est vrai ! Avec le temps, tout s’en va.
Ma vie passe à sentir trop fort, trop beau, à deviner le dégoût à venir, à faire le pitre, à me protéger des violeurs et des salopes, à être absolument efficace et parfois brutale.
Quand le bébé est mort, il est mort. Quand il faut se tirer de l’héroïne, je la butte. Quand mon mari aime une autre femme, il est parti. Quand mon patron me licencie, je suis licenciée. Quand je suis au chômage je dois trouver une autre façon de gagner ma vie. Quand l’amant me lâche j’embrasse un autre. Quand c’est l’automne, j’en fais un poncho. Quand ce sera l’été le soleil aura ma peau.
Maintenant que je suis exsangue du violeur des mots, maintenant que les serpents de la haine et de l’effroi ne sifflent plus sur ma tête, maintenant que je ne fais plus de ménages et surtout plus le sien
Je veux bien qu’on m’aime.
Je veux bien que mes parents m’offrent les vêtements dans lesquels ils me trouvent belle
Je veux bien dire je t’aime un peu n’importe comment sans craindre de perdre qui que ce soit.
Je veux bien me calmer.
Je veux bien admettre que je suis dédoublée, je vis avec Elle. Elle m’envahit, le soir et je n’ai rien à dire car c’est moi. Il vaut mieux que je ne l’ignore pas. Oui, il vaut mieux. Parfois elle me reprend et je suis sa violence, son outrecuidance, son dégoût, son immense chagrin.
Viens ma peine. Je n’ai jamais compris la balance de tes jours mais tu caresses ma tête et mes cheveux emmêlés comme personne ne l’a fait. Tu mets ta main froide entre mes cuisses et tu attends que ma peau se réchauffe sans la forcer. Tu me parles, tu me consoles. Il n’y a que toi qui saches tout ce qui m’irait, tout ce qui rétablirait mon corps oublié, tout ce qui ferait que je me lève le matin dans un certain ordre qui organise une journée pleine où je ne paniquerai pas.
Ne me lâche pas, tu m’as toujours raccompagnée, même quand je perdais connaissance dans le trou noir de l’ivresse.
J’ai mangé le pain blanc de la vie normale. Maintenant une nouvelle ère s’annonce.
Vient ma folie, vient ma douce.
Quand je dessine le mieux c’est toi, quand j’écris à flots c’est toi. Quand je fais le mieux l’amour à un homme que je prends, c’est toi,
Je te parle sous tous les tons, bas, muets, affranchis quand nous sommes seules et que nous pouvons nous entretenir.
Cette année a été si terrible, je ne voudrais jamais revivre une telle déréliction. Je suis exactement une femme d’aujourd’hui.
Je n’ai aucune solution ni aucun avis. Je hais les programmes, les bilans, les élections, les révolutions, les hommes dans leur masse, le cours de l’histoire, l’idée de progrès, ce qui m’importe est moi. Moi qui me coltine la vie. Si étrange. Comment je fais, comment j’aime, comment je me tiens au bastingage, comment je suis la moins moche.